Laurent is an european entrepreneur. His posts explore leadership, entrepreneurship and innovation through personal essays.

Pretotyping, apprendre avant d'échouer

Pretotyping, apprendre avant d'échouer

Etre entrepreneur, c’est aussi savoir partager avec ses idées et ses recettes à succès avec les autres. C’est savoir aider les autres entrepreneurs à croître et à progresser. Alors s’il n’y avait qu’une seule bonne résolution à prendre, ça serait de se lancer et de parler de son experience tout autour de soi. 

Aujourd’hui, je partage avec vous, certains des points sur lesquels je suis intervenu lors de la conference BlendWebMix 2014, dans une conférence appelée “Pretotyping, apprendre avant d’échouer.” Vous trouverez la présentation dans son integralité en fin de cet article. J’adorerais intervenir à nouveau sur ce thème : dans votre entreprise ou dans lors d’un évènement que vous organisez. Notez bien, qu’il ne s’agit pas d’une présentation technique. Le pretotyping est un ensemble de pratiques universelles, qu’on peut appliquer à tous les secteurs d’activité. C’est avant tout un état d’esprit tourné vers l’experimentation et le droit à l’erreur. 

Si vous avez manquez mon premier article sur le Pretotyping, retrouvez le ici : Comment réussir à créer un produit qui répond à un marché

Le pretotyping par la pratique

Imaginons que, comme beaucoup de personnes, vous avez une idée de site internet, ou d’application pour téléphone mobile. Mais plutôt que d’investir tout votre temps libre ou tout votre Livret A, vous avez décidé de créer vous-même un pretotype.

Vous allez créer ce qu’on appelle un “Pinocchio”. Un sorte de simulation du produit final qui en aura l’apparence sans en avoir l’ensemble des capacités. Suivez ces étapes :

  • Laissez tomber votre ordinateur, votre clavier, votre tablette. Ils ne vous serviront à rien.

  • Prenez en main votre smartphone, et mesurez-le.

  • Découpez des bouts de cartons et de papiers de la taille de votre téléphone. Faites en plusieurs, vous en aurez besoin !

  • Maintenant, respirez un bon coup, et dessinez l'interface de votre future application !

  • Que voyez vous sur l'écran d'accueil ?

  • Comment utilise-t-on votre application ?

  • Lors du premier démarrage que se passe-t-il ?

  • Il faut que vous représentiez de façon graphique visuelle et détaillée votre produit

Mettez maintenant votre application, ou plutôt vos bouts de cartons, dans votre poche de pantalon ou votre sac à main. C'est là que les ennuis commencent et que l’on revient à la réalité.

A chaque fois que vous sentez le besoin d'utiliser l'application, sortez les cartons de votre poche et faites semblant de l'utiliser. Notez l'heure et la date de ce moment dans un petit carnet.

A la lecture de ces 7 étapes, vous pouvez légitimement vous demander à quoi tout cela vous mène ? Pourquoi des simples bouts de papiers pourraient vous éclairer sur votre future application. Après tout, ils ne représentent que très partiellement ce que vous avez en tête. Un smartphone possède une résolution d’écran extraordinaire, des couleurs magnifiques et il est capable de vibrer ou d’être interactif…

Tout cela est vrai, mais là n’est pas l’essentiel. Le pretotype que vous avez créé avec votre papier, vos ciseaux et vos crayons vous permet de mesurer l’efficacité de votre idée. Voilà le point essentiel : ne pas s’en remettre à son feeling, mais établir des mesures qui vous permettront de quantifier vos idées.

Ainsi, après avoir créé rapidement ce pretotype, allez-vous être capable de noter :  

  • à chaque fois que vous sortez votre “fausse” application de la poche

  • à chaque fois que vous utilisez réellement la fonction principale... ou une autre fonction de votre application

  • le jour de la semaine où le pretotype voit la lumière du jour, et même l’heure de la journée.

  • et surtout comment ces mesures vont évoluer dans le temps.

Toutes ces notes et ses mesures vous permettront de regarder les choses en face.

Les chiffres ne mentent pas !

Analyser et conclure

Cette démarche analytique vous permettra de bien comprendre quels sont les ressorts de votre potentiel produit. Vous l’avez compris, le grand avantage du pretotyping, c’est qu’il permet de réaliser ces essais avant même d’avoir dépensé du temps, de l’énergie et de l’argent.

Après quelques semaines, il faudra faire un premier bilan à partir de vos notes. Mettez-les au propre dans un ou plusieurs tableaux de synthèse. Et posez-vous les questions suivantes vis-à-vis de votre produit / pretotype :

  • Est-il utile ? Si c’est le cas, vous devez trouver des moments clefs de votre expérience où il a été clef. Si votre application permettait de trouver un restaurant, combien de fois l’avez-vous utilisée au cours des deux derniers mois ?

  • Est-il addictif ? Au début, vous l’avez sûrement sorti de la poche très souvent, peut-être trop souvent. Mais au fil des semaines, l’usage a-t-il été récurrent ? Un bon produit s’utilise tous les jours. C’est par exemple la grande force de Facebook : on y vient, on y revient et on continue à y revenir…

  • Que pouvez-vous retirer ? Less is More disait le sage. En tant qu’entrepreneur, vous allez devoir financer votre projet et moins vous en aurez à faire, mieux cela sera. Si votre idée n’a de sens que parce qu’on y trouve “tout”, vous avez probablement un problème de proposition de valeur.

  • A qui s’adresse-t-il ?

  • Et surtout : quels problèmes résoud-il ? Il faut que les problèmes à résoudre soient bien maitrisés afin de pouvoir

Si vous dressez un bilan négatif au travers de ces questions, ne perdez pas espoir. C’est tout à fait logique qu’on n’arrive pas du premier coup. Faites des modifications, revoyez votre copie et  recommencez l'expérience.

Extract from Toptal Pretotyping Article

Concept pretotypes give the perfect starting point to begin learning about what works and what doesn’t, using data collected from simple tests and/or experiments. This process begins the de-risking of projects by developing a deeper and more accurate understanding of various components of project delivery.
— Paul Morris

Pretotype vs Prototypes

Les plus cyniques d’entre vous se diront que tout cela existe déjà et s’appelle un prototype. Je pense pourtant qu’il existe de vraies différences entre un pretotype et un prototype, les deux étant complémentaires.

Le Pretotyping   est   un   moyen   rapide   et   peu   coûteux   de   tester   une   idée   en   créant une   version   simplifiée   à   l'extrême,   virtuelle   ou   factice   du   produit,   dans l’objectif   de   valider   l'hypothèse   " Si   nous   le   concevons,   est-­ce   que   les   gens   vont l'utiliser ?"

Le Prototyping, de son coté, répond à d’autres questions :

  • est-il possible de construire le produit ? quelle est sa faisabilité ?

  • est-on capable de le construire ?

  • quelles matières premières et quels outils sont nécessaires ?

  • quels sont les facteurs d’échelle ?

  • à quel coût et dans combien de temps pourra-t-on avoir les premiers produits à vendre ?

Le Prototyping est donc une démarche de scientifico-technique visant à confronter une idée à la réalité des technologies actuelles. Il s’agit d’un développement expérimental. Le Pretotyping permet de valider l'intérêt pour un produit et de cerner son usage. Le Prototyping est l’outil de l’ingénieur. Le Pretotyping de l'innovateur.

Pretotyping pour la vente

Peut-on utiliser cette démarche pour vendre ses produits ? Trouver la meilleure accroche pour son service ?  Oui !

Car c’est vrai que la majorité des exemples sont tournés sur la création de produit technologique, mais vous pouvez très bien utiliser le pretotyping pour travailler au marketing et à la vente.

Prenons l’exemple de Best Buy, une grande chaine de magasin américaine.  Best Buy voulait lancer un service de reprise des anciennes consoles de jeu, lors de l’achat d’une nouvelle. Plutôt que de structurer un lourd service logistique, des investissements dans le système informatique, et une formation des vendeurs, Best Buy a fait une expérience de Pretotyping. Ils ont loué une tente qu’ils ont posé sur le parking d’un magasin lors d’un weekend. Ils ont tracté dans la ville du magasin,  indiquant que durant le week end, il faisait une opération spéciale de reprise des anciennes consoles, avec un discount sur les nouvelles.

Et that’s all ! Bilan de l’opération, quelques ventes et surtout l’apprentissage d’une idée importante : c’est bien beau de pouvoir vendre son ancienne console, mais que fait-on de ses anciens jeux qui ne sont pas compatibles avec la nouvelle ? Il faudra donc que Best Buy s’occupe aussi du marché des jeux d’occasion.

Un autre exemple célèbre est la technique décrite par Tim Ferris, dans La semaine de 4H. Il s’agit de tester l’attrait d’un marché avec une “Fausse Porte”, comme si l’on créait la devanture d’un magasin virtuel. Imaginez un passant qui, circulant dans la rue et étant attiré par la vitrine, rentrait dans la boutique, mais y trouvait un panneau disant : “Désolé, mais nous sommes encore en cours d’approvisionnement, laissez-nous votre nom et téléphone, on vous rappellera dès que possible !

Si, dans la vie réelle, cela semble difficile, dans le monde numérique c’est possible ! Tim Ferris décrit la technique suivante, en tirant parti de Adwords :

  • Créez une “landing page” avec un logo, une photo et un texte attractif. Proposez aux utilisateurs de laisser leur email pour être recontacté.

  • Choisir sur Adwords une liste de mots-clés caractéristiques de votre produit

  • Créez plusieurs annonces sur Adwords qui pointent sur la “landing page”. Chaque annonce doit tester une proposition de valeur différente (la qualité, le prix, une fonction-clé, etc.)

Adwords vous donnera alors :

  • le nombre d’impression, c’est-à-dire le nombre de personnes ayant vu votre annonce. C’est le nombre de passants qui s'arrêtent devant votre vitrine.

  • le nombre de clics, c’est-à-dire le nombre de personnes ayant cliqué sur votre annonce. C’est le nombre de passants qui entrent dans la boutique

  • le CTR (click-through rate) ou taux de clics, c’est le ratio entre les deux chiffres.

  • Vous pouvez alors mesurer précisément l’intérêt de vos potentiels clients :

Entre toutes les annonces, laquelle vous permet de faire entrer le plus de clients dans votre boutique ? Celle qui a le meilleur CTR.

Une fois dans la pseudo boutique combien de personnes laissent leur email et sont donc très motivées à être acheteurs de votre solution ? C’est ce qu’on appelle le taux de conversion.

Imaginons que vous ayez 10 000 personnes ayant vu une annonce, que 100 aient vraiment cliqué dessus, et que 5 aient laissé leur email. Une autre annonce qui n’aurait eu que 30 clics au lieu de 100 serait bien moins attractive. Il faudrait donc reconsidérer le produit ou le marché visé.

Conclusion

Comme annoncé plus haut, voici les supports de ma présentation faite lors de BlendWebMix.

J’espère que ces quelques mots vous aurons donner l’envie de réaliser des pretotypes de vos idées les plus personnelles et les plus originales. Quant à savoir si elles sont prometteuses, je vous laisse à vos pretotypes !


Comprendre l'Innovation, un must pour les entrepreneurs

Comprendre l'Innovation, un must pour les entrepreneurs

Le Phare : Entreprendre en Provence et en Méditérranée

Le Phare : Entreprendre en Provence et en Méditérranée